lundi 17 août 2009

Email 2 : 14 juin 2009

Objet : D’autres petites nouvelles

Bonjour tout le monde,

Je vous remercie pour les beaux mots que vous m’avez envoyés, ça fait un bien fou !

Mon courriel cette semaine va être un peu décousu, car je n’ai pas beaucoup de temps sur l’ordinateur et disons que je ne suis pas au summum de ma forme...

Au Bénin, près de 7 millions d’habitants, qui s’expriment en plus de 100 dialectes, se côtoient dans une harmonie et un pacifisme légendaire pour un pays africain. Et c’est sans parler des différentes religions (animisme, christianisme, islam, etc.) pratiquées. Ça contraste avec notre grand Canada bilingue divisé ! N’ayez crainte, je ne change pas mon fusil d’épaule, c’est simplement que ça relativise bien des choses.

La semaine dernière, nous avons visité une petite ville tout près de Cotonou qui s’appelle Grand Popo. Notre principale activité lors de cette visite : la PLAGE ! Mais on ne peut pas se baigner à cause des vagues. L Sur la plage il y avait une fête où plusieurs personnes dansaient sur des rythmes africains, nous les avons donc joints. Nous nous sommes mis à danser avec eux pendant 2 heures ! J’ai dû surpasser ma gêne!! On a même chanté avec eux :

« Je suis dans la joie,
une joie immense,
je suis dans l’émotion,
car Yahvé m’a libérée. »

tout en se faisant photographier sans arrêt comme si on était des vedettes hollywoodiennes. Mais ici la vraie star c’est dieu, il est présent partout, dans les chansons, dans le nom des commerces, à la télévision, dans l’affluence incroyable devant l’église le dimanche matin.

Comme la ville ici est très polluée et bruyante, nous avons décidé pour nous dégourdir et relaxer un peu, de nous prendre un abonnement à la piscine d’un hôtel du coin. Donc, pour 15 000 Francs CFA par tout le mois de juin (40$), on peut se baigner tous les soirs et profiter d’une salle d’aérobie. J Je suis raquée...

Dans un atelier sur les différences culturelles, on nous a aussi partagé la vision, ou les préjugés, que certains Africains ont des Occidentaux. Ils croient que nous sommes tous riches, névrosés, individualistes, racistes, homosexuels (ici c’est interdit), intelligents, trop curieux (certains pensent même que nous sommes des espions pour la CIA). Mais bon, il s’agit de préjugés, tous ne pensent pas comme ça ! Ça nous a quand même bien fait rire. Dans ce même atelier, on a beaucoup parlé de sensibilisation aux IST et au Sida, ce qui est comme on le sait, un sujet très délicat. Et bien, une expression populaire béninoise concernant le port du condom dit : « On ne peut pas consommer la banane avec sa pelure. » Il y a encore beaucoup de travail à faire !

La polygamie est également très présente autant chez les catholiques que chez les musulmans. Les Béninois croient qu’il y a beaucoup plus d’hommes que de femmes et que chaque femme doit trouver un mari pour subvenir à ses besoins. Par contre, les statistiques disent qu’il y a autant d’hommes que de femmes. Alors, c’est une excuse ? Un peu choquant...
Lorsqu’il en a les moyens, l’homme doit s’occuper du plus de femmes possible... Par contre, en milieu citadin, la polygamie est plus cachée, les hommes appellent leurs maîtresses leurs « bureaux » et les visites rendues à ces dernières par l’homme sont priorisées en fonction de leur importance et de leur intérêt. On riait en imaginant un homme rentrer tard à la maison un soir et dire à sa femme : « Désolé de mon retard chérie, je suis resté tard au bureau ce soir. »

Nous sommes en plein dans la saison des pluies, à l’époque, il n’était pas rare qu’il pleuve à tous les jours, cependant avec les changements climatiques la pluie est beaucoup moins fréquente. Dans un sens, je crois bien que ce soit une bonne chose qu’il ne pleuve pas trop (depuis notre arrivée, il a plu environ 10 fois, surtout la nuit), car ces pluies diluviennes provoquent des inondations impressionnantes et des coupures de courant fréquentes. Les routes en terre battue inondée, ça fait de la grosse bouette ! Et même plusieurs maisons sont inondées et les gens ne peuvent pas sortir de chez eux, car une marre d’eau les en empêche. La pluie fait quand même tomber l’humidité qui nous colle à la peau. Ce matin, on a dû traverser une rue tellement inondée qu’il y avait de l’eau jusqu’à la moitié de la portière du camion. Ce qui me fascine par contre, c’est que tout le monde ici garde le sourire! Une imagine frappante : Un petit garçon tout nu qui pisse dans une marre d’eau stagnante dans laquelle il a les deux pieds.

À les voir aller sur leur moto, les Africains semblent posséder un sens inné de l’équilibre. En effet, il n’est pas rare de croiser des motos transportant plus de 3 personnes ou des objets insolites : un congélateur ou une base de lit. Quand on parle de conduite dangereuse !! Une chance que nous avons notre jeep, on se sent plus en sécurité ! Ce chaos sur les routes semble tout de même organisé puisque nous n’avons pas vu d’accidents majeurs depuis notre arrivée.

Samedi dernier, Julie et moi avons été invités par notre mère d’accueil Claire, à assister à un concours culinaire où participaient des professionnelles des Medias. Donc, 5 femmes journalistes s’affrontaient dans une chaude lutte culinaire. Au menu : bouffe africaine, chansons religieuses et chanteur qui fait du lipsing (!!??). Ce fut par contre très intéressant, car cet événement se voulait un prétexte pour rassembler les femmes professionnelles du monde des médias en soulignant les difficultés qu’elles rencontrent quotidiennement (heures irrégulières, travail de nuit, chef du foyer – parce que bien sûr ici en théorie le chef de foyer c’est l’homme... mais dans les faits !? - en tant que mère au foyer (car ici même pour les femmes de carrière, la cuisine appartient à la femme !). Autrement dit, une centaine de féministes se sont donné une petite tape dans le dos, pas fou comme idée. J’en ai donc profité pour me faire des contacts, je fais un stage en communication après tout. On m’a présenté à la directrice des publications du quotidien la Nation, un grand journal ici. Je vais la rencontrer dans les prochaines semaines pour mieux comprendre le métier de journaliste pour une femme en Afrique. Mes amies relationnistes, ne vous inquiétez pas, je ne sauterai pas la clôture comme ça trop souvent ! Mais le meilleur dans tout ça c’est que l’événement était filmé par la chaîne des nouvelles et que j’ai passé à la télé, je flashais dans la masse d’Africains il faut croire!! J’aurai donc laissé mon empreinte, si minime soit-elle, à la télévision béninoise.

Alors voilà, j’espère que ce courriel est lisible!! De mon côté, je retourne me coucher, ma tête est sur le point d’exploser!

Pat xx


P.-S. :
Je ne sais pas si j’ai expliqué à tout le monde la raison de notre présence au Bénin. Alors si ça vous intéresse, voici un résumé du projet :


Depuis juillet 2006, la Fondation Paul Gérin-Lajoie finance, avec l’aide de l’ACDI, un projet d’appui à la formation professionnelle au Bénin. Ce projet vise principalement à développer un modèle de reconversion professionnelle des chauffeurs de taxis motos de Cotonou (appelés les « Zémidjans ») et des vendeuses d’essence par le biais d’une formation professionnelle en atelier dans des filières économiques porteuses d’avenir liées à l’environnement (maraîchage, froid domestique, mécanique moto et mécanique auto).

Les « Zémidjans » sont appréciés par la population béninoise, car ils sont une solution à la carence des transports publics, par contre, ils sont également souvent accusés d’être à l’origine de la pollution toujours grandissante de la ville et sont beaucoup trop nombreux pour les besoins. Selon le Ministère de l’Environnement béninois, 83 tonnes de monoxyde de carbone sont quotidiennement émises au Bénin, dont la moitié est due aux deux-roues. Aussi, leur conduite automobile n’étant pas sécuritaire, ils sont à l’origine de centaines d’accidents mortels au cours d’une année.

C’est donc dans une politique globale de lutte contre la pollution et de réduction de la pauvreté que le projet propose une stratégie à même d’offrir une alternative en matière d’emploi aux chauffeurs de taxis moto et aux vendeuses d’essence à Cotonou. Le projet se base sur l’approche par compétences, expertise reconnue du Canada. La formation professionnelle, la théorie et la pratique se donneront en ateliers chez des maîtres artisans.

La mairie de Cotonou et le Ministère de l’Environnement béninois apportent également une contribution financière. Cependant, le programme de subvention de la Fondation, de l’ACDI et des deux partenaires locaux prend fin en juin 2010, d’où la nécessité de se munir d’un outil promotionnel facilitant la recherche de futurs partenariats financiers. Ainsi, deux documentaires seront réalisés : le premier, conçu conjointement avec les Béninois, prendra la forme d’un outil corporatif visant à renforcer et appuyer les capacités communicationnelles du projet (c’est sur celui-là que je travaille), alors que le second sera destiné au public québécois et aura pour objectif de sensibiliser la population de chez nous à des contextes environnementaux différents du nôtre.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire